Manière de faire la méditation.
Récitez d'abord les actes suivants :
« Mon Dieu, je vous crois ici présent et je vous adore de tout mon coeur. Seigneur, je devrais être déjà en enfer à cause de mes fautes, je me repens de vous avoir offensé; pardonnez-moi. Père éternel, pour l'amour de Jésus et de Marie, donnez-moi vos lumières.»
Puis recommandez-vous à la Vierge, à S. Joseph, à votre Ange gardien et à votre Saint Patron.
1). Lisez le sujet de MÉDITATION en vous arrêtant aux pensées où votre âme trouve sa nourriture.
2). Faites ensuite des ACTES d'humilité et de remercîment, mais surtout de contrition et d'amour, de soumission à
la volonté de Dieu et d'offrande de vous-même, redisant : « Seigneur, faites de moi ce qu'il vous plaira. Donnez-
moi de connaître votre volonté, je veux l'accomplir en tout.»
3). Adressez à Dieu vos PRIÈRES, lui demandant en particulier la sainte persévérance, son amour, la lumière et la
force pour accomplir sa divine volonté et la grâce de toujours prier.
4). Prenez la RÉSOLUTION particulière d'éviter le défaut dans lequel vous tombez le plus souvent.
En terminant, recommandez à Dieu les âmes du purgatoire et les pécheurs, et récitez un PATER et un AVE.
MAXIMES ÉTERNELLES
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MÉDITATION POUR LE DIMANCHE.
La fin de l'homme.
1
Considère, ô mon âme, que Dieu t'a donné l'être. Il t'a créée à son image, et sans que tu l'aies mérité, il t'a adoptée pour enfant au saint baptême; il t'a aimée plus qu'un père; il t'a donné l'existence pour que tu l'aimes et le serves en cette vie, et que tu ailles ensuite jouir de lui-même en paradis. Tu n'es donc pas née et tu ne dois pas vivre pour te livrer aux plaisirs, pour manger, boire et dormir comme les bêtes, mais uniquement pour aimer ton Dieu et faire ton salut éternel. Quant aux choses créées, le Seigneur les a mises à ton usage comme des moyens qui doivent t'aider à parvenir à ta grande destinée.
Malheureux que je suis ! je me suis préoccupé de tout sauf de ma fin dernière ! O mon Père, pour l'amour de Jésus, faites que je commence une nouvelle vie, toute sainte et toute conforme à votre divine volonté.
II
Considère qu'au moment de mourir, tu éprouveras de grands remords si tu n'as pas été fidèle à servir Dieu. Quelle peine ce sera pour toi, si, à ta dernière heure, tu dois constater que de toutes tes richesses, grandeurs, gloires et joies il ne te reste qu'un peu de fumée ! Tu seras stupéfait en voyant, que pour des bagatelles et des riens, tu as perdu la grâce de Dieu et ton âme elle-même, sans pouvoir réparer ce mal, ni te remettre dans le bon chemin.
O désespoir ! ô tourment ! Tu verras alors, mais trop tard, combien vaut le temps; tu voudras l'acheter au prix de ton sang, mais tu ne le pourras pas. O jour amer pour qui n'a pas aimé et servi Dieu !
III
Considère combien on néglige cette fin si importante. On pense à amasser des richesses, à manger, à festoyer, à se donner du bon temps, etc; et on ne songe pas à servir Dieu, ni à sauver son âme : la fin éternelle ne compte pas. C'est ainsi que la plupart des chrétiens s'en vont en enfer en banquetant et en s'amusant. Oh ! s'ils savaient ce que veut dire ce mot enfer ! O homme, tu te fatigues tant pour te damner, et tu ne veux rien faire pour te sauver ! Sur le point de mourir, un secrétaire de François 1er, roi de France, s'écriait : « Malheureux que je suis ! j'ai usé tant de papier pour écrire les lettres de mon prince, et je n'en ai pas employé une seule feuille pour me rappeler mes péchés et faire une bonne confession ! » Philippe III, roi d'Espagne, disait en mourant : « Oh ! si seulement j'avais passé ma vie à servir Dieu dans un désert au lieu d'être roi ! » Mais alors à quoi servent ces gémissements et ces regrets, si ce n'est à augmenter le désespoir ?
Apprends donc au dépens des autres à vivre préoccupé de ton salut, si tu ne veux pas tomber dans le même désespoir. Et sache que tout ce que tu fais, tout ce que tu dis ou penses en dehors du bon plaisir de Dieu, tout cela est perdu. Allons ! il est temps de changer de vie. Et quoi ! veux-tu attendre pour te désabuser que tu sois à l'article de la mort, aux portes de l'éternité, sur le seuil de l'enfer, lorsqu'il n'y aura plus moyen de corriger ton erreur ?
Mon Dieu, pardonnez-moi. Je vous aime plus que tout. Je me repens souverainement de vous avoir offensé. -- Marie, mon espérance, priez Jésus pour moi.
MÉDITATION POUR LE LUNDI.
L'importance de la fin de l'homme.
I
Considère, ô homme, combien il importe que tu parviennes à ta grande destinée : c'est tout pour toi, car si tu l'atteins, tu te sauves, tu seras toujours heureux, tu jouiras de tous les biens dans ton corps et dans ton âme ; mais si tu la manques, tu perds ton âme, ton corps, le paradis et Dieu, tu seras éternellement malheureux et damné pour toujours. Ainsi donc, entre toutes les affaires, la seule affaire importante, la seule nécessaire, c'est de servir Dieu et de sauver son âme. Cher chrétien, ne dis donc plus : je vais d'abord me procurer ce plaisir ; plus tard je me donnerai à Dieu et j'espère me sauver. Cette fausse espérance, ah ! combien n'en a-t-elle pas conduits en enfer ! Eux aussi tenaient ce langage : maintenant ils sont damnés, et pour eux, il n'y a plus de remède. Il n'y en a pas un qui ait eu la volonté de se damner. Dieu maudit celui qui pèche dans l'espoir du pardon ( Job. XI, 20 ). Tu dis : je vais commettre ce péché, et puis je m'en confesserai ! -- Qui sait si tu en auras le temps ? Qui te garantit que tu ne mourras pas subitement après ton péché ? Quoi qu'il en soit, tu perds la grâce de Dieu. Et si tu ne la recouvres plus ? -- Dieu fait miséricorde à celui qui le craint et non à celui qui le méprise ( Luc. I, 50 ). Ne dis pas non plus : je me confesserai aussi facilement de trois péchés que de deux ; non, parce que Dieu te pardonnera peut-être deux péchés et non pas trois. Dieu patiente, mais il ne patiente pas toujours ( II Macch. VI, 14 ). Quand la mesure est pleine, Dieu ne pardonne plus ; il frappe de mort le pécheur ; ou bien, châtiment pire que la mort, il l'abandonne, en sorte que ce malheureux, de péché en péché, tombe en enfer.
Réfléchis, mon frère, à ce que tu viens de lire. Assez de péchés : donne-toi à Dieu. Crains que cet avertissement ne soit le dernier que Dieu t'envoie. Assez longtemps tu l'as offensé ; assez longtemps il t'a supporté. Si tu commets encore un péché mortel, tremble que Dieu ne te pardonne plus. Considère qu'il s'agit de ton âme, qu'il y va de ton éternité. Oh ! cette grande pensée de l'éternité, combien n'en a-t-elle pas détachés du monde ? combien n'en a-t-elle pas envoyés dans les cloîtres, dans les déserts et dans les cavernes ?
Malheureux que je suis ! Que me reste-t-il de tous les péchés que j'ai commis ? Il m'en reste un coeur tourmenté, une conscience chargée, l'enfer que j'ai mérité et la perte de Dieu. Oh ! mon Dieu et mon Père, attachez-moi à votre amour.
II
Considère que cette affaire de l'éternité est la plus négligée. On pense à tout, excepté à se sauver. On a du temps pour tout, excepté pour Dieu. Qu'on dise à une personne du monde de fréquenter les sacrements, de faire une demi-heure d'oraison chaque jour, elle répondra : je ne le puis, j'ai des enfants à élever, une propriété à faire valoir, un commerce à diriger ; j'ai trop à faire ! -- Et quoi ! n'as-tu pas une âme ? Au moment de la mort, si tu te damnes, sont-ce tes richesses ou tes enfants qui te viendront en aide et t'empêcheront de tomber en enfer ? Ne te flatte pas de pouvoir concilier Dieu avec le monde, le paradis avec le péché. Le salut de ton âme n'est pas une affaire qui s'arrange toute seule ; il faut te faire violence à toi-même, il faut te donner de la peine, si tu veux acquérir la couronne immortelle. Que de chrétiens se promettaient de servir Dieu plus tard et de se sauver, et se trouvent maintenant en enfer ! Quelle folie de penser sans cesse à cette vie qui finit si vite, et de se préoccuper si peu de celle qui ne finira jamais. Ah ! chrétien, songe à ce qui t'attend ! Pense que bientôt tu sortiras de ce monde pour entrer dans la demeure de ton éternité ! Malheur à toi, si tu te damnes ! Ne l'oublie pas : ce sera pour toujours.
III
Considère et dis : J'ai une âme; si je la perds je perds tout. J'ai une âme ; si au prix de cette âme je gagne un monde, à quoi cela me servira ? Si je deviens un grand personnage et que je perde mon âme, quel sera mon profit ? Si j'accumule des trésors, si j'élève une maison, si j'enrichis mes enfants, et que je perde mon âme, qu'y gagnerai-je ? Quel avantage procurent les grandeurs, les plaisirs, les vanités à tous ces pauvres mondains dont le corps tombe en poussière dans une fosse, et dont l'âme est confinée dans les profondeurs de l'enfer ? Si donc mon âme m'appartient, si je n'ai qu'une âme, et si une fois perdue, mon âme est perdue sans retour, je dois avoir à coeur de la sauver. C'est une affaire trop importante : Il s'agit d'être ou toujours heureux ou toujours malheureux.
O mon Dieu, j'avoue avec confusion que jusqu'à présent j'ai vécu en aveugle ; j'ai erré loin de vous, et je n'ai pas songé à sauver cette unique âme que j'ai. Pour l'amour de Jésus-Christ, sauvez-moi, ô Père. Je consens à perdre tout, ô mon Dieu ! pourvu que je ne vous perde pas ! --Marie, mon espérance, sauvez-moi par votre intercession.
MÉDITATION POUR LE MARDI
Le péché mortel.
I
Considère que tu es créé par Dieu pour l'aimer, et que tu t'es révolté contre lui avec une ingratitude infernale ; tu l'as traité en ennemi, tu as méprisé sa grâce, son amitié. Tu savais que par ce péché tu lui causais un grand déplaisir et tu l'as commis quand même. Que fait celui qui pèche ? Il tourne le dos à Dieu ; il lui manque de respect ; il lève la main pour lui donner un soufflet ; il afflige le coeur de Dieu ( Is. LXIII, 10 ). Celui qui pèche dit à Dieu par le fait : Éloigne-toi de moi, je ne veux pas t'obéir ; je ne veux pas te servir ; je ne veux pas te reconnaître pour mon Seigneur ; je ne veux pas te traiter en Dieu ; mon Dieu à moi, c'est ce plaisir, cet intérêt, cette vengeance. Voilà ce que tu as dit dans ton coeur quand tu as préféré la créature à Dieu. Ste Madeleine de Pazzi ne pouvait croire qu'un chrétien puisse commettre un péché mortel, les yeux ouverts ; et toi, mon cher lecteur, qu'en dis-tu ? Combien en as-tu commis ?
Mon Dieu, pardonnez-moi ; ayez pitié de moi. Je vous ai offensée, Bonté infinie ; je me repens de vous avoir outragé si injustement, ô Dieu digne d'un amour infini.
II
Considère que Dieu te disait lorsque tu voulais pécher : Mon enfant, je suis ton Dieu ; je t'ai tiré du néant ; je t'ai racheté au prix de mon sang : je te défends de commettre ce péché, sous peine d'encourir ma disgrâce. -- Et toi en péchant, tu répondais à Dieu : Seigneur, je ne veux pas vous obéir ; je veux me procurer cette satisfaction ; votre bon plaisir et votre grâce m'importent peu. -- Tu as dit : « Je n'obéirai pas » ( Jér. II, 20 ).
Ah ! mon Dieu, voilà ce que j'ai fait plus d'une fois ! Comment m'avez-vous supporté ? Oh ! que ne suis-je mort avant de vous avoir offensé ! Je suis résolu de ne plus vous déplaire ; je veux vous aimer, ô Bonté infinie ! Donnez-moi la persévérance. Donnez-moi votre saint amour.
III
Considère que lorsque les péchés atteignent un certain nombre, Dieu abandonne le pécheur : « Pour punir, Dieu attend avec patience que l'homme ait comblé la mesure des iniquités » ( II Macch. VI, 14 ). Ainsi donc, ô mon frère, si tu es encore tenté de pécher, ne dis plus : je m'en confesserai ensuite. -- Et si Dieu te fait mourir auparavant ! Et si Dieu t'abandonne ! qu'en sera-t-il de toi pour l'éternité ? Il en est tant qui se sont ainsi perdus ! Eux aussi espéraient le pardon ; mais la mort est venue et ils se sont damnés ! Tremble qu'il en soit de même pour toi. Il ne mérite pas miséricorde, celui qui se prévaut de la bonté de Dieu pour l'offenser. Après tant de péchés que Dieu t'a déjà pardonnés, tu as une juste raison de craindre qu'au premier péché mortel que tu commettrais encore, il ne te pardonne plus. Remercie-le de t'avoir attendu jusqu'à présent ; et prends en ce moment la ferme résolution de plutôt mourir que de commettre encore un péché. Désormais ne cesse de lui dire : Seigneur, assez longtemps je vous ai offensé. La vie qui me reste je ne veux plus l'employer à vous déplaire. Non, vous ne le méritez pas. Je veux uniquement l'employer à vous aimer et à pleurer les offenses que je vous ai faites : je m'en repens de tout mon coeur. Mon Jésus, je veux vous aimer ; donnez m'en la force. -- Marie, ma mère, aidez-moi. Ainsi soit-il.
MÉDITATION POUR LE MERCREDI.
La mort.
I
Considère, ô homme, comment cette vie doit finir. Déjà la sentence est prononcée : tu dois mourir. La mort est certaine, mais on ne sait quand elle viendra. Que faut-il pour mourir ? Une fibre qui se brise dans le coeur, une veine qui se rompt dans la poitrine, un catarrhe qui étouffe, une hémorragie, la morsure d'un insecte venimeux, une fièvre, une blessure, un ulcère, une inondation, un tremblement de terre, la foudre, un éclair, c'est assez pour t'ôter la vie. La mort viendra te surprendre au moment où tu y penseras le moins. Combien qui le soir se sont couchés pleins de santé et qu'on a trouvé morts le lendemain! Cela ne peut-il pas t'arriver également ? -- Combien de personnes qui sont mortes subitement et qui ne s'attendaient pas à mourir ainsi ; c'est ainsi cependant qu'elles sont mortes; et si elles se trouvaient alors en état de péché, où sont-elles maintenant ? et où seront-elles durant toute l'éternité ? -- Quoi qu'il en soit, il est certain que le moment viendra, où tu entreras dans une nuit qui durera toujours, ou dans un jour qui ne finira jamais. « je viendrai comme un voleur, à l'improviste et à la dérobée » a dit Jésus-Christ. Ce bon Sauveur t'en avertit à temps, parce qu'il aime ton âme. Réponds aux vues de Dieu ; profite de son avertissement, prépare-toi à bien mourir avant que la mort arrive : « Tenez-vous prêts » ( Matth. XXIV, 44 ). Ce ne sera plus alors le temps de se préparer, mais bien de se trouver prêt. Il est certain que tu dois mourir : la scène de ce monde doit finir pour toi, mais tu ne sais quand. Qui sait si dans un an, dans un mois, si demain, tu seras encore en vie ?
Mon Jésus, éclairez-moi et pardonnez-moi.
II
Considère comment à l'heure de la mort, tu te trouveras étendu sur un lit, assisté peut-être d'un prêtre qui te fera les prières de la recommandation de l'âme, entouré de tes parents qui te pleureront ; on te présentera le crucifix ; on allumera un cierge ; tu seras sur le point de passer à l'éternité. Tu te sentiras la tête accablée, les yeux obscurcis, la langue brûlante, la gorge fermée, la poitrine oppressée, le sang glacé, les membres anéantis, le coeur brisé. Tu laisseras tout ; pauvre et dépouillé de tout, tu seras descendu dans une fosse et abandonné à la corruption. Là, les vers et les rats te rongeront les chairs ; bientôt il ne restera de toi que quelques os décharnés et un peu de poussière infecte : rien de plus. Ouvre une tombe, et vois ce qu'est devenu cet opulent, cet avare, cette mondaine ! Ainsi finit la vie. A l'heure de la mort, tu te verras entouré de démons qui te remettront sous les yeux tous les péchés commis depuis ton enfance. Maintenant pour t'exciter au péché, le démon excuse tes fautes ; il te dit qu'il n'y a pas grand mal dans cette vanité, ce plaisir, cette confidence, cette aversion, qu'il n'y a pas de mauvaise intention dans ces conversations légères ; mais à la mort, il te révélera la gravité de tes fautes ; et à la lumière de cette éternité où tu seras sur le point d'entrer, tu comprendras quel mal c'était d'offenser un Dieu infini. Hâte-toi d'y porter remède, maintenant que tu le peux encore, car alors il ne sera plus temps.
III
Considère que du moment de la mort dépend l'éternité. Voici un homme sur le point d'expirer : il est conséquemment sur le point d'entrer dans l'une ou l'autre des deux éternités. Son sort est attaché à ce dernier soupir. Dans un instant, quand il l'aura exhalé, son âme sera ou sauvée ou damnée pour toujours. O instant, ô soupir, ô moment d'où dépend une éternité ! une éternité ou de gloire ou de peine ! une éternité ou toujours heureuse ou toujours malheureuse ! une éternité ou de joies ou de tourments ! une éternité ou de tous les biens ou de tous les maux ! une éternité ou de paradis ou d'enfer ! Ce qui revient à dire que si à ce moment-là, tu te sauves, tu n'auras jamais plus rien à souffrir, tu seras toujours content et heureux. Si au contraire, tu manques le but, si tu te damnes, tu seras dans les tourments et le désespoir, tant que Dieu sera Dieu : toujours. A la mort, tu connaîtras ce que signifie paradis, enfer, péché, Dieu offensé, loi de Dieu méprisée, péchés cachés en confession, bien d'autrui non restitué.-- Malheureux que je suis, s'écriera le moribond, d'ici à quelques instants, je devrai comparaître devant Dieu. Et qui sait quelle sera ma sentence ? Où irai-je ? En paradis ou en enfer ? Me réjouir avec les anges ou brûler avec les damnés ? Serai-je enfant de Dieu ou esclave du démon ? Sous peu, hélas ! je le saurai : et là où j'entrerai, je demeurerai éternellement. Dans quelques heures, dans quelques moments, qu'en sera-t-il de moi ? Qu'en sera-t-il de moi, si je ne répare pas ce scandale, ce dommage, cette réputation ? si je ne pardonne pas de coeur à mon ennemi ? si je me confesse mal ? -- Alors tu maudiras mille fois ce jour où tu as péché, cette satisfaction, cette vengeance que tu t'es permise ; mais ce sera trop tard et sans fruit, parce que tu le feras uniquement par crainte du châtiment et sans amour de Dieu.
Ah! Seigneur, voici que désormais je reviens à vous ; je ne veux pas attendre la mort pour me convertir ; dès ce moment, je vous aime ; je m'attache à vous, je veux mourir dans vos bras. -- Marie, ma Mère, faites que je meure sous votre manteau ; venez-moi en aide au dernier moment.
MÉDITATION POUR LE JEUDI.
Le jugement dernier.
I
Considère comment ton âme à peine sortie de ton corps, sera amenée au tribunal de Dieu pour être jugée. Le juge est un Dieu tout-puissant que tu as outragé et irrité au plus haut point. Les accusateurs sont les démons, tes ennemis ; les pièces du procès, tes péchés ; la sentence est sans appel, la peine est un enfer. Plus de compagnons, plus de parents, plus d'amis, c'est entre toi seul et Dieu que tout se passera. Alors tu verras toute la laideur de tes péchés, sans pouvoir les excuser, comme tu le fais maintenant. Tu seras examiné sur tes péchés de pensée, de parole, de complaisance, d'action, d'omission, de scandale, etc. Le tout sera pesé dans la grande balance de la justice divine ; et si tu es trouvé en défaut sur quelque point, tu es perdu !
Jésus, mon Sauveur et mon juge, pardonnez-moi avant que je comparaisse à votre jugement.
II
Considère que la divine justice doit juger toutes les nations dans la vallée de Josaphat, quand à la fin du monde, les corps ressusciteront pour recevoir conjointement avec l'âme, la récompense ou le châtiment. Songe que si tu te damnes, ce même corps que tu reprendras, servira d'éternelle prison à ton âme malheureuse. A cette triste rencontre, l'âme maudira le corps, et le corps maudira l'âme ; de sorte que l'âme et le corps qui s'accordent maintenant pour se procurer des plaisirs défendus, seront contraints de s'unir à nouveau pour être les bourreaux l'un de l'autre. -- Au contraire, si tu te sauves, ton corps ressuscitera impassible, et resplendissant de beauté ; et tu seras admis en corps et en âme à jouir de la vie bienheureuse. Ainsi finira la scène de ce monde. Ainsi s'évanouissent toutes les grandeurs, tous les plaisirs et toutes les pompes d'ici-bas. Tout est passé ; il ne reste que les deux éternités, l'une de gloire, et l'autre de supplice; l'une bienheureuse, et l'autre malheureuse ; l'une de joies, et l'autre de tourments ; en paradis, les justes ; en enfer, les pécheurs. Alors sera bien à plaindre celui qui aura aimé le monde, et qui pour les misérables satisfactions de la terre aura tout perdu, son âme, son corps, le paradis et Dieu.
III
Considère l'éternelle sentence. Le divin Juge Jésus-Christ, se tournera vers les réprouvés et leur dira : C'en est fait, ingrats, c'en est fait. Mon heure est venue, heure de vérité et de justice, heure de colère et de vengeance. Malheureux ! vous avez voulu la malédiction, eh bien ! qu'elle tombe sur vous ! Soyez maudits dans le temps, maudits dans l'éternité ! Retirez-vous de moi, allez, privés de tout les biens et chargés de tous les maux, allez au feu éternel ( Matth. XXV, 41 ).
Ensuite Jésus se tournera vers les élus et leur dira : Venez, vous, mes enfants bénis ; venez prendre possession du royaume des cieux qui vous était préparé; venez, non plus pour porter la croix à ma suite, mais bien la couronne avec moi; venez partager l'héritage de mes richesses et de ma gloire; venez chanter éternellement mes miséricordes; venez de l'exil à la patrie, de la misère à la gloire, des larmes à la joie, de la peine à l'éternel repos (Matth. XXV, 34 ).
Mon Jésus, moi aussi, j'espère être un de ceux que vous bénirez alors. Je vous aime par-dessus tout. Bénissez-moi dès maintenant. Et vous aussi, bénissez-moi, ô Marie, ma mère.
MÉDITATION POUR LE VENDREDI.
L'enfer.
I
Considère que l'enfer est une prison horrible, pleine de feu. Les damnés sont plongés dans ce feu; ils ont un abîme de feu sur eux, un abîme autour d'eux, un abîme sous leurs pieds; feu dans les yeux, feu dans la bouche, feu partout. En outre, chaque sens a son supplice particulier : les yeux sont aveuglés par la fumée et les ténèbres, et apeurés à la vue des autres damnés et des démons ; les oreilles n'entendent jour et nuit que hurlements, plaintes et blasphèmes ; l'odorat souffre de la puanteur de ces innombrables corps en putréfaction ; le goût est tourmenté par une soif ardente et une faim dévorante, sans pouvoir jamais obtenir ni une goutte d'eau, ni un morceau de pain. Aussi ces malheureux prisonniers, brûlant de soif, dévorés par les flammes, en proie à toutes les tortures, poussent-ils des gémissements et des cris de désespoir ; mais pour eux, il n'y aura jamais soulagement ni consolation. O enfer, enfer ! il est des hommes qui ne croiront à ton existence que quand ils seront tombés dans tes abîmes !
Qu'en dis-tu, cher lecteur ? S'il te fallait mourir en ce moment, où irais-tu ? Tu ne peux supporter une étincelle de feu en ta main, et tu t'exposes à demeurer dans un étang de feu et de si cruelles tortures, sans secours et sans consolation, durant toute l'éternité ?
II
Considère ensuite les peines qui affligeront les puissances de l'âme. La mémoire sera toujours tourmentée par le remords de la conscience : c'est là le ver qui rongera sans cesse le damné, en lui reprochant de s'être perdu volontairement pour quelques plaisirs empoisonnés. Hélas ! comme elles lui paraîtront peu de chose ces satisfactions d'un moment, après cent ans, après des millions d'années passées en enfer. Ce ver rongeur lui fera souvenir du temps que Dieu lui avait donné pour réparer ses fautes, des facilités qu'il avait pour sauver son âme, des bons exemples qu'il a reçus de son entourage, des résolutions qu'il avait prises et qu'il n'a pas tenues ; alors il verra qu'il n'y a plus de remède à son éternel malheur. Oh ! quel double enfer que celui-là ! -- La volonté sera toujours contrariée : elle n'aura jamais rien de ce qu'elle voudrait, et elle aura toujours ce qu'elle ne voudrait pas, c'est-à-dire, toutes sortes de tourments. -- L' intelligence connaîtra le grand bien qu'elle a perdu, à savoir le paradis, Dieu !
Mon Dieu, mon Dieu, pardonnez-moi pour l'amour de Jésus-Christ.
Pécheur, toi qui maintenant te préoccupes si peu de la perte du paradis et de Dieu, tu connaîtras ton aveuglement quand tu verras les élus triompher et se réjouir dans le royaume des cieux, tandis que toi, comme un animal immonde, tu seras chassé de cette bienheureuse patrie, loin de la belle face de Dieu, loin de la compagnie de Marie, des anges et des saints. Alors tu t'écrieras avec désespoir : O paradis de délices, o Dieu qui êtes le Bien infini, vous n'êtes pas pour moi ! je ne vous posséderai jamais !
Courage, mon frère, fais pénitence, change de vie ; n'attends pas toi aussi qu'il ne soit plus temps ; donne-toi à Dieu ; commence à l'aimer pour de bon. Prie Jésus, prie Marie, qu'ils aient pitié de toi.
MÉDITATION POUR LE SAMEDI.
L'éternité des peines.
I
Considère que l'enfer n'a pas de fin. On y endure éternellement tous les supplices, de sorte qu'après cent ans, mille ans de souffrances, l'enfer ne fera que commencer. Passeront encore cent mille ans, cent millions, mille millions d'années et de siècles, et l'enfer en sera encore au même point. Si un ange venait maintenant annoncer aux damnés que Dieu les délivrera de l'enfer, lorsqu'il se sera écoulé autant de millions de siècles qu'il y a de gouttes d'eau, de feuilles d'arbres et de grains de sable dans la mer et sur la terre, tu en serais épouvanté et cependant ce malheureux éprouverait plus de joie à cette nouvelle que tu n'en ressentirais si l'on t'apprenait que tu deviens roi d'un grand peuple. Oui, car le damné se dirait : il est vrai que je dois souffrir encore de longs siècles, mais un jour viendra où ces siècles seront passés. -- Hélas ! tous ces siècles passeront et l'enfer en sera toujours à son commencement. Qu'on multiplie tous ces siècles autant de fois qu'il y a de grains de sable, de gouttes d'eau et de feuilles d'arbre, quand ils seront écoulés, l'enfer en sera toujours à son point de départ. -- Tous les damnés feraient volontiers cette convention avec Dieu : Seigneur, augmentez mon supplice autant qu'il vous plaira ; Seigneur, faites-le durer aussi longtemps que vous le voudrez ; pourvu que vous y mettiez un terme, je suis content. Mais non, ce terme ne viendra jamais,-- Si du moins, le malheureux damné pouvait se faire illusion, en se disant : Qui sait ? peut-être qu'un jour Dieu aura compassion de moi et me délivrera de l'enfer ? -- Impossible, le réprouvé aura toujours sous les yeux l'arrêt de sa condamnation éternelle et devra se dire : Toutes ces peines que je souffre, ce feu, ces douleurs, je les endurerai toujours. Quand finiront-elles ? Jamais ! ô toujours ! ô jamais ! ô éternité ! ô enfer ! Comment les hommes peuvent-ils croire à vous et offenser Dieu ? et demeurer dans le péché ?
II
Mon frère, fais attention, et pense que pour toi également il y a un enfer, si tu pèches. Déjà cette horrible fournaise est allumée sous tes pieds, et pendant que tu lis ces lignes, que d'âmes y tombent ! Pense que si tu y vas une fois, tu ne pourras jamais plus en sortir. Et si déjà tu avais mérité l'enfer, remercie Dieu de ne t'y avoir pas précipité ; et vite, vite, répare le mal; pleure tes péchés ; prends les moyens les plus sûrs pour sauver ton âme, confesse-toi souvent ; fais une lecture chaque jour dans ce livre ou dans un autre livre spirituel ; embrasse la dévotion à la Ste Vierge, en récitant chaque jour ton chapelet, en jeûnant le samedi; résiste aux tentations en invoquant fréquemment Jésus et Marie ; fuis les occasions de péché ; et si Dieu t'appelle même à quitter le monde, n'hésite pas, n'hésite pas ! Quoi qu'on fasse pour éviter une éternité de tourments, c'est peu, ce n'est rien. Et pour s'assurer l'éternité bienheureuse, on ne peut jamais prendre trop de précautions. (1) Vois combien d'anachorètes, afin d'échapper aux supplices éternelles, sont allés passer leur vie dans les grottes et les désert ! Et toi, que fais-tu, après avoir tant de fois mérité l'enfer ? Que fais-tu ? Prends garde de te damner. Donne-toi à Dieu et dis-lui :
Seigneur, me voici, je veux faire tout ce que vous demandez de moi. -- O Marie, venez à mon aide.
VIVE JÉSUS MON AMOUR,
ET MARIE MON ESPÉRANCE !
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(1) Nulla nimia securitas ubi periclitatur æternitas. S. Bernard.)